Pétition à Medeah 1847
République Française
Liberté, Egalité, fraternité
A Monsieur le Général de Division
Gouverneur Général de l’Algérie
Médéah, le 28 9bre 1847
Monsieur le Gouverneur général,
« Les soussignés, délégués des anciens militaires établis à Médéah, qui ont appris avec plaisir qu’exécutant la promesse que vous leur aviez faite le 28 novembre dernier, vous avez ordonné une enquête sur les faits qu’ils vous ont soumis à cette date.
Les soussignés sont entièrement convaincus qu’en donnant cet ordre, vous avez voulu qu’il fût exécuté à la lettre et qu’une véritable enquête en fût les conséquences, c’est ce qui n’a pas eu lieu.
Mr le Commandant de place, désigné par Mr le Commandant supérieur pour procéder à cette enquête, s’est contenté d’appeler une partie des individus qui avaient eu une part dans la distribution contre laquelle nous avons protesté et il suffisait de l’assertion individuelle de chacun d’eux pour établir qu’ils étaient méritants ; il en est de même des quels on a refusé d’examiner les pièces qu’ils produisaient.
Dans notre ignorance des choses judiciaires, nous avions pensé qu’une enquête devait être faite par des magistrats étrangers à la localité, ayant intérêt à connaître la vérité, et qui, se trouvant en dehors des convenances de la camaraderie eussent fait une enquête contradictoire de laquelle, nous en sommes certains, la lumière eût jaillie.
Malgré tout ce que l’on a pu faire pour éviter d’y voir clair, il n’en est pas moins résulté de ce simulacre d’enquête, que la plupart des privilégiés de cette inique répartition n’ont aucun mérite et pour rétablir les opinions à ce sujet, nous vous adressons ci inclus le tableau explicatif des dix huit heureux, mais ce que l’enquête a complètement effacé, c’est la participation morale de Mr Bréauté à cette répartition et c’est précisément ce qu’il y a de plus clair et ce que nous tenons le plus à établir.
Si Mr Bréauté n’avait pas établi cette fameuse liste des dix huit, pourquoi, lors de sa confection, aurait il dit à Mr Obry : vous avez été militaire, vous êtes marié, je vais vous faire avoir 500 francs.
Pourquoi aurait il, à la même époque, arrêté le Sr Henon sur la voie publique en lui disant : vous avez été militaire ? oui- vous allez être père de famille puisque vous êtes marié ? –ma femme a accouché il y a huit jours ; cela se trouve bien, car je vous ai porté comme tel sans le savoir, pour vous faire avoir 300 à 400 francs.
Pourquoi, si Mr Bréauté n’avait pas coopéré à l’établissement de la liste, pourquoi aurait il dit à Mr le Commandant de place, le jour où les mandats étaient arrivés et après en avoir pris connaissance : eh bien, commandant, c’est notre liste sans aucun changement ?.
De tous ces faits, qui prouvent d’une manière irréfragable la participation de Mr Bréauté à la répartition contre laquelle nous protestons, nous avons des témoins oculaires et auriculaires qui viendront en témoigner le jour où une véritable enquête sera faite.
Nous connaissons tous l’habilité de Mr Bréauté, nous savons qu’il sait s’emparer très adroitement de la bienveillance de ses supérieurs, mais nous avons le bon droit pour nous, et si le fait de cette répartition ne suffit pas à le démontrer et le faire enfin apprécier à sa juste valeur, nous dirons que Mr Bréauté, chargé en 1843 de faire du bois pour l’Administration, en a vendu à des particuliers, que ce fait a été constaté par un procès-verbal du Brigadier de Gendarmerie Queyron qui a été forcé au silence par de plus haut placés que lui. Nous dirons qu’il a été la cause physique de l’assassinat de toute la famille Justine qui, arrivée en 1844 avec des capitaux et des bras pour cultiver, fut placée à une lieue de la ville dans un endroit tout à fait isolé par Mr Bréauté qui possédait ou convoitait déjà les terrains plus rapprochés de Médéah, et qu’il possède aujourd’hui.
Nous disons qu’au début de cette année, une dénonciation formelle contre le dit Bréauté a été faite par plusieurs habitants de cette ville et adressée à Mr le Gouverneur et que, pour en amortir l’effet, le dit Bréauté par deux de ses créatures a fait circuler en ville et à des domiciles désignés une pièce que nous désignerons sous le nom de Certificat de bonne conduite (tant cette désignation convient à sa forme) et que pour obtenir des signatures les agents étaient autorisés à promettre une des prairies dont la distribution était proche.
Nous demandons par quelles heureuses spéculations Mr Bréauté pauvre sous lieutenant des chasseurs en 1842 possède aujourd’hui de 15 à 20 hectares de prés, vignes, tous labourables à Médéah, et comment il a fait bâtir une maison évaluée à 25 ou 30 mille francs ?. Ce ne sont certes pas ses économies, car le train qu’il mène les absorbe et au-delà ;
Ce n’est pas la fortune de ses parents : son frère qui est domestique à Médéah nous prouve le contraire.
Mr Bréauté dira peut être que c’est la fortune de sa concubine, Mme Bottini qui lui a construit sa maison, et nous dirons que Mr Bréauté n’a eu toutes ses propriétés qu’après avoir surpris d’une manière indigne la religion du Ministre de la guerre, qu’il a fait construire sa maison qu’en se servant des matériaux et les ouvriers attribués aux travaux de la pépinière qui touche à ses propriétés.
Tous ces faits sont si patents et si faciles à prouver, qu’après vous en avoir donneé connaissance, nous allons les livrer à la publicité, car des hommes semblables sont des fléaux dans les localités où ils se trouvent, et il est bon il est nécessaire de les faire connaître.
Les délégués des anciens militaires
Signés : Guinot, Etiévant
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